La Gazette

des Comores

Juridiction d’exception, une hérésie juridique !

Juridiction d’exception, une hérésie juridique ! © : HZK-LGDC

Depuis le début de la semaine se tient au tribunal de Moroni sous la présidence du juge Omar Ben Ali, le procès sur la citoyenneté économique qui voit des hauts personnages du régime Sambi défiler à la barre.


A défaut de la haute cour de justice censée juger les hautes personnalités qui ont eu à diriger le pays, c’est la cour de sûreté de l’Etat qui siège en lieu et place. La cour de sûreté de l’Etat est une juridiction d’exception comme il en existe sous d’autres cieux. Dans les vieilles dictatures, ces tribunaux étaient assimilés à une justice expéditive censée punir les opposants aux régimes en place. Avec l’introduction de la démocratie dans la plupart des pays, la forme de ces juridictions a peu à peu changé même si, sur le fond, tous ceux qui sont appelés à comparaître, on les juge à la solde des régimes en place. L'hérésie de ces cours tient selon ces opposants du fait qu’elles violaient une règle élémentaire du droit, qui est le principe de degré de double juridiction. Cette dernière est un principe de droit qui donne la latitude à la défense de se pourvoir devant une juridiction supérieure si elle juge que le verdict ne lui plait pas. « Le double degré de juridiction est le fait qu’une décision de justice soit portée devant une autre juridiction qui lui est supérieur pour confirmer ou infirmer les sentences et discuter les points de droit et les faits », définissent certains juristes.

 

Aux Comores comme ailleurs, la question des juridictions d’exception a toujours fait couler beaucoup d’encre quant à leur constitution comme des cours légalement établies. Au Sénégal en 2012, la réactivation de la Cour de Répression de l’Enrichissement Illicite avait suscité nombre de débats dans les milieux judiciaires. Créé en 1981, la CREI est un organe mis en place par le gouvernement sénégalais pour juger tout enrichissement illicite surtout si celui-ci est lié à des détournements de deniers publics. A cette époque, c’est Karim Wade fils de l’ancien président Abdoulaye Wade qui était sous les feux de cette juridiction. Le déroulé du procès avait conduit des éminents juristes à remettre en cause la légalité de la cour. « La CREI ne garantit pas les droits des personnes inculpées par cette juridiction d’exception », s'était désolé à l'époque Patrick Baudouin de la Fédération Internationale des Droits de l’Homme. Et il avait regretté le recul de l’Etat de droit au Sénégal. « Il est regrettable que cet organe d’un autre âge ait été réactivé sans avoir été mis en conformité avec les principes les plus élémentaires du droit de la défense », avait-il poursuivi.

 

Un point de vue que semble partager Maître Ahamed Ali Abdallah, Avocat au barreau de Moroni qui dit, ne plus être surpris par la tournure des événements aux Comores. « Moi il n’y a rien qui me surprend dans ce pays à partir du moment que j’ai vu un décret présidentiel dissoudre la Commission Anti corruption, une commission qui a été créée par une loi », dit-il, avant d’ajouter que « je ne connais pas la force d’un décret face à la loi, je l’ai découvert à travers cet acte, donc depuis rien ne me surprend dans ce pays ». Et de conclure : « A propos des juridictions d’exception, on ne sait pas par quel texte légal ils tirent la base de ces juridictions d’exception ».

 

AS Badraoui

 

 


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