La Gazette

des Comores

Présidentielle 2024 : Azali dans l’attente des félicitations de la France

Présidentielle 2024 : Azali dans l’attente des félicitations de la France © : HZK-LGDC

En s’abstenant de féliciter Azali Assoumani, déclaré élu dès le premier tour par la Cour suprême, l’Union Européenne en général et la France en particulier le privent d’une caution morale qui, tout compte fait, n’est pas négligeable.


Le mouvement des agriculteurs français n’a quand même pas affecté Emmanuel Macron au point de lui faire oublier qu’à environ 8000 kilomètres de Paris, et à 70 kilomètres de Mayotte, dans une ancienne colonie française, un chef d’État habitué du palais présidentiel de l’Élysée a été déclaré réélu à sa propre succession par la plus haute juridiction de son pays. La France n’a toujours pas adressé un message de félicitation à Azali Assoumani, pourtant premier partenaire de l’archipel, dix jours après la proclamation des résultats définitifs par la Cour suprême. Pas plus que l’Union Européenne dont le silence est également très remarqué. Pourtant lors de la présidentielle de 2019, la France, à travers son ambassade à Moroni, s’était empressée de féliciter le même Azali Assoumani à l’issue d’un scrutin dont les irrégularités ont été soulignées par les observateurs, l’Union Africaine en tête.

 

L’absence de réaction, du moins publique, de la part de Paris pour le double scrutin du 14 janvier semble en dire long sur la position d’un pays dont la politique est massivement rejetée en Afrique en général, et dans la région du Sahel en particulier, en faveur d’autres puissances peu soucieuses de démocratie. Azali Assoumani est par ailleurs l’un des rares présidents africains à avoir engagé leurs pays pour la résolution de l’ONU contre l’invasion russe en Ukraine, quand d’autres ont pris fait et cause pour Moscou ou ont joué la carte de l’abstention. C’est peu dire que le malaise est tellement profond du côté des Occidentaux, connus pour rendre l’ascenseur au bon moment. « Franchement nous ne doutons pas de la position du gouvernement français et de l’Union Européenne sur le processus électoral aux Comores », assure le porte-parole du gouvernement Houmed Msaidie, interrogé par nos soins. Sans doute, l’assurance du plus tonitruant des ministres du gouvernement Azali, transige-t-elle avec celle de l’opposition.

 

Pour Mohamed Daoudou, candidat à la dernière présidentielle et ancien ministre de l’Intérieur d’Azali entre 2016 et 2021, la France et l’UE essaient de reconsidérer leur politique vis-à-vis des Comores. « La position de l’UE et de la France est claire à travers le communiqué [publié dans la foulée des manifestations post-électorales]. Contrairement aux années passées où l’UE prenait toujours acte des résultats, cette fois elle a exprimé des doutes sur la sincérité des résultats de la Ceni et a demandé des éclaircissements. Malheureusement, à ce jour, ni la Ceni ni la Cour suprême n’ont pu apporter des réponses convaincantes. Bien au contraire, la Cour a fait pire ». Des disparités relevant de l’incohérence ont été relevées dans les chiffres communiqués par la Ceni avec notamment un grand écart entre le suffrage exprimé pour la présidentielle et celui des gouvernatoriales, pour un double scrutin tenu le même jour.

 

Même son de cloche pour Daoud Halifa, cheville ouvrière de la campagne de Bourhane Hamidou, lui aussi candidat à la présidentielle. « Je crois comprendre que le mutisme observé par l'Union Européenne dont la France qui est la plus concernée, réside sur leur doute à croire à la victoire d'Azali. Pour rappel l'Union Européenne a son représentant, la France aussi à travers sa représentation diplomatique. Tous disposent des vrais résultats. Certainement leur conscience les empêche de reconnaître une mascarade sans précédent dans l'histoire électorale mondiale », avance-t-il.

 

En France, Sébastien Delogu, député de La France Insoumise (gauche) des Bouches-du-Rhône a appelé son pays à « ne pas reconnaître le résultat de l'élection présidentielle du dimanche 14 janvier 2024 ». L’Italie reste pour l’heure le seul pays membre de l’UE à avoir félicité Azali Assoumani quelques jours avant la tenue à Rome, en début de semaine, du sommet Italie-Afrique auquel le locataire de Beit-Salam était un invité d’honneur, de par son statut de président en exercice de l’Union Africaine. Si l’UE en général et la France en particulier maintiennent leur position, elles auront ainsi privé le régime d’Azali d’une caution morale qui, tout compte fait, n’est pas négligeable. Quoi qu’il en soit, le peuple comorien, quant à lui, saura en tirer ses propres conclusions et à chacun de faire sa lecture devant l’Histoire.

 

Toufé Maecha

 

 

 

 


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