Des beaux projets en cours, mais… Ces dernières années, l’État comorien ne cesse de multiplier ses efforts pour rendre la vie plus abordable au citoyen lambda.
Les beaux projets sont en cours : agriculture, tourisme, numérique, etc., mais malgré ces initiatives, la vie quotidienne reste compliquée pour beaucoup. Un problème économique majeur continue de freiner le pouvoir d’achat et le bon fonctionnement du marché : la disparition progressive de la monnaie divisionnaire. Les pièces de 5, 10, 20, 25 et 50 francs, et même celle de 100 francs, autrefois omniprésente, se font désormais rares dans les transactions quotidiennes. Dans un contexte où 1 euro équivaut à environ 492 francs comoriens (KMF), cette situation engendre des conséquences immédiates et visibles sur les prix et le pouvoir d’achat des Comoriens. Faute de monnaie de petite valeur, les prix sont systématiquement arrondis aux 100 francs près, générant une inflation silencieuse difficile à mesurer mais très perceptible pour les consommateurs, en particulier pour les ménages modestes. Des exemples frappants illustrent ce phénomène : l’augmentation du prix du litre de gazole de 50 francs a entraîné celle de la baguette de 150 à 200 francs, au motif que certaines machines de boulangerie fonctionnent au carburant. De même, le kilo de thon est passé de 3 000 à 4 000 francs, soit une hausse de 33 %, alors que le prix du gazole pour alimenter les vedettes de pêche n’a augmenté que de 8 % (de 600 à 650 francs le litre).
La situation est aggravée par les pratiques commerciales sur les marchés locaux.
Figure 1. Pièce de 5 francs comoriens, le fameux RIYAL
La plupart des denrées alimentaires — fruits, légumes et produits de première nécessité — ne sont pas vendues au poids mais en portions arbitraires, fixées par le vendeur. Les prix sont ainsi arrondis et déterminés unilatéralement, ce qui limite la liberté d’achat des clients et crée un déséquilibre entre commerçants, chacun pratiquant ses tarifs indépendamment. Si les vendeurs souhaitaient revenir à la vente au kilo, ils se heurteraient immédiatement à l’absence de monnaie divisionnaire, incapable de permettre de rendre correctement la monnaie pour de petites quantités. Les ménages pauvres, vivant souvent au jour le jour, sont les premières victimes de cette situation. Ils ne peuvent plus acheter exactement les quantités désirées et voient leur pouvoir d’achat s’éroder à chaque transaction. Les petits commerces et l’économie informelle, qui représentent l’épine dorsale de l’activité économique locale, sont également fragilisés. Sans monnaie divisionnaire, les commerçants doivent improviser, arrondir les prix, substituer des produits à la monnaie ou renoncer à certaines ventes, perturbant l’ensemble des transactions quotidiennes.
À ce jour, les causes exactes de la disparition des petites pièces restent floues, mais les conséquences sont indéniables et préoccupantes. À titre de comparaison, dans les pays développés en Europe, notamment en France, l’une des principales puissances économiques mondiales, la monnaie divisionnaire circule encore activement, et même les pièces de 1 centime d’euro sont utilisées par la population, malgré l’essor des paiements numériques. Cette présence garantit précision dans les transactions, stabilité des prix et confiance dans le système monétaire — autant d’enseignements dont les Comores pourraient s’inspirer. Il est donc impératif que les autorités comoriennes évaluent rapidement cette situation et mettent en place des solutions adaptées : restauration de la circulation des pièces, harmonisation des prix sur les marchés et protection du pouvoir d’achat des consommateurs. La disparition des pièces n’est pas un simple désagrément : c’est un problème économique majeur, qui freine le développement du pays et désorganise les transactions quotidiennes. À quand une régulation réfléchie et cohérente pour enfin booster l’économie nationale, en pensant d’abord aux populations les plus modestes, qui vivent en dessous du seuil de pauvreté ? Les Comoriens méritent une économie transparente, équilibrée et juste — où le prix réel des biens redevient enfin… réel.
Par Abdallah DARKAWI, PhD
Expert en systèmes électroniques complexes & systèmes embarqués
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