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des Comores

Artisanat Yaz : l’artiste qui transforme un simple stylo Bic en œuvre d’art

Artisanat Yaz : l’artiste qui transforme un simple stylo Bic en œuvre d’art © : HZK-LGDC

Saandi Iliassa Alhadhur (Yazid), connu sous le pseudonyme de YAZ est l'un des talents les plus prometteurs de la scène artistique comorienne. Il se présente comme un artiste visuel. Dessinateur et peintre, il s'est spécialisé dans le dessin au stylo bille bleu, notamment les portraits sur papier. Il peint aussi des fresques et des tableaux. Originaire de Nvunambadani Itsandra, ce jeune homme a développé une passion pour l'art dès son plus jeune âge. Mais ce qui le distingue des autres, c'est son outil de travail peu commun : un simple stylo Bic. Avec cet instrument de base, il crée des œuvres d'art complexes et détaillées qui reflètent son imagination débordante et son regard unique sur le monde. De retour aux Comores après sa participation au world culture festival au Pakistan, il nous partage à travers cet entretien, son parcours, son inspiration, ses expériences et sa technique de dessin exceptionnelle.


On peut dire que la créativité était déjà présente dans son entourage. « J'ai commencé à dessiner vers l'âge de 6 ou 7 ans, inspiré par un portrait réalisé par mon oncle. » C'est ainsi que le petit Yazid a commencé à explorer son don pour le dessin. « J'ai toujours su ce que je voulais faire depuis mon plus jeune âge. Je me souviens que déjà au collège je me voyais me consacrer entièrement à l'art. » Ceci bien qu'il soit conscient du manque d'appui institutionnel dans ce domaine aux Comores, notamment du ministère de la culture qu’il pointe du doigt. Le jeune artiste peintre a cru en son rêve et à la valeur de ses créations. « Je m'estime chanceux car j'ai eu la chance de bénéficier d'un soutien inconditionnel de la part de ma famille. » Après avoir obtenu son bac, notre invité a décidé de se consacrer pleinement à son art, renonçant à poursuivre des études classiques. « Pour moi, l'art est plus qu'une simple activité : ce n'est pas qu'un métier, c'est une vocation. Je me considère réellement artiste depuis peu », avoue-t-il. Toute sa vie, il a fait de son talent sa priorité, même lorsque les opportunités semblent limitées, il demeure optimiste.

 

Jusqu'ici, il a fait deux expositions solo : une première aux Comores en 2023 à l'Alliance Française, et cette deuxième exposition internationale pour le World Culture Festival il y a un mois. Qui dit artiste dit thèmes et inspirations. Qu'en est-il des siens ? « Mes œuvres puisent leurs inspirations principalement dans la culture comorienne, en particulier le rôle central de la femme dans la société comorienne. » L'artiste exprime une nette préférence pour le stylo à billes plutôt que pour la peinture. Selon lui, le stylo à billes lui permet de prendre le temps de mieux réfléchir sur la vie et sur les messages qu'il souhaite transmettre à travers ses œuvres. Il apprécie particulièrement la liberté que lui offre cet instrument pour exprimer ses pensées et observer comment les gens réagissent aux situations de la vie. Yaz souligne également que la peinture est davantage une activité commerciale pour lui, lui permettant de recevoir des commandes pour des fresques, des portraits et d'autres créations. Il voit simplement la peinture comme un moyen de subsistance, tandis qu'à sa considération personnelle sur son véritable art est celui qu'il crée avec son stylo, sans contraintes ni préoccupations financières.

 

Comment lui est venue l'idée de cette technique exceptionnelle ? « À la base, je ne trouvais pas de bon matériel. J'avais juste deux ou trois crayons qui étaient du même niveau et du coup, je n'arrivais pas à soutirer quelque chose de très profond comme je l'aurais souhaité. J'ai essayé le stylo Bic et ça m'a beaucoup plu, » déclare l'artiste. C'est alors qu'il décide de se tourner vers d'autres outils pour exprimer sa créativité. Il commence à faire des petits dessins au stylo Bic et découvre une nouvelle texture qui lui plaît. « Petit à petit, j'admirais la texture, la sincérité surtout qui s'y dégageait. » Cette expérimentation lui a permis de trouver une nouvelle voie d'expression artistique.

 

Lorsqu'il mélange son matériau avec du tissu, il observe des résultats intéressants. Cela suggère qu'il explore également les propriétés physiques des matériaux pour créer des œuvres uniques. « La pratique et la passion sont les clés de la réussite, » affirme Yaz. « C'est un long travail minutieux, il peut prendre entre 94 et 400 heures, selon la complexité de la pièce…Au fil des ans, ma passion n'a fait que grandir. Les portraits sont devenus mon domaine de prédilection, » ajoute le jeune homme.

 

Récemment, il a eu l'opportunité de participer à un festival mondial des cultures qui se déroulait à Karachi. Il a reçu le soutien de l'ambassade de France pour ce grand voyage. Avec une passion dévorante pour l'art, Saandi Iliassa Alhadhur a su se démarquer à travers ses contributions à la représentation culturelle de son pays, malgré les challenges qu'il a rencontrés. L'objectif de ce festival était de promouvoir l'échange culturel, la compréhension et l'appréciation des différentes cultures du monde à travers une célébration vibrante et dynamique de la créativité artistique. « Cette expérience a été un tremplin pour moi, il m'a permis de me mesurer et montrer mes preuves à d'autres artistes talentueux venus du monde entier », nous explique-t-il fièrement.

 

Quant aux projets futurs et aux collaborations fructueuses, il dit ne pas en avoir de particuliers. « Ce qui compte c'est de partager la même vision. Mon objectif est de continuer à explorer le monde et à promouvoir la culture comorienne à travers mon art, » s'exprime-t-il sûr de lui. Il espère cependant collaborer très bientôt avec une artiste pakistanaise nommée Zarnaab. Ensemble, ils prévoient de travailler à nouveau sur un grand projet. Par ailleurs, il envisage actuellement de réaliser une œuvre qui lui tient à cœur, axée sur les femmes pour le 8 mars 2026, journée mondiale des droits de la femme. À la question de savoir quels conseils il donnerait à un jeune désirant se lancer dans la même voie, notamment artistique, il répond : « Je dirais que le plus important est de croire en son potentiel, toujours persévérer quoi qu'il arrive. S'écouter soi-même et non les mauvaises critiques des autres. » En effet, son parcours est un témoignage vivant de la puissance de la passion et de la détermination.

 

Hamdi Abdillahi Rahilie

 


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